Robin Hopquin, « L’uchronie régressive de la trilogie Retour vers le futur » (n° 3 | 2024)

Résumé / Abstract
Il est dif­fi­cile d’imag­in­er une fic­tion répon­dant plus à la notion de « rétro­topie » que la trilo­gie Retour vers le futur. Il s’ag­it dans les dif­férents épisodes de revenir vers une époque fan­tas­mée (celle des années 1950 dans les volets 1 et 2 ; celle de la fin du XIXe siè­cle dans le volet 3), afin de régler les divers­es régres­sions – au sens de Bau­man – de la société améri­caine des années 1980. Cette portée rétro­topique est néan­moins mod­ulée par la dimen­sion uchronique de la série, puisqu’il s’ag­it tou­jours de chang­er le cours de l’his­toire au prof­it de la famille McFly. D’un côté, les alter­na­tives tem­porelles per­me­t­tent à la saga de s’in­scrire dans l’idéolo­gie rea­gani­enne des années 1980 qui vise à revi­talis­er le présent en puisant dans l’idéal passéiste des années 1950. En changeant le cours des événe­ments Mar­ty ne crée certes pas un monde meilleur, mais il améliore la con­di­tion sociale de sa famille, pas­sant du camp des vain­cus humil­iés à celui des vain­queurs. D’un autre côté, les passés filmés sont explicite­ment mon­trés comme des fan­tasmes ciné­matographiques, si bien que chaque époque tra­ver­sée est déjà une sorte d’uchronie, dans la mesure où elle est con­sciem­ment la recon­struc­tion d’un passé his­torique médi­atisé par le ciné­ma. Cet arti­cle se pro­pose d’é­tudi­er la manière dont la saga crée une uchronie régres­sive, sur un plan à la fois idéologique et formel, inspirée autant par l’am­bi­tion de faire renaître un temps dis­paru que par une nos­tal­gie du présent.

The regres­sive uchrony of the Back to the Future trilogy
It’s hard to imag­ine a work of fic­tion more in keep­ing with the notion of « retro­topia » than the Back to the Future tril­o­gy. In the var­i­ous episodes, the aim is to return to a fan­ta­sized era (the 1950s in parts 1 and 2; the late 19th cen­tu­ry in part 3), in order to address the var­i­ous regres­sions — in Bau­man’s sense — of Amer­i­can soci­ety in the 1980s. This retro­topic scope is nonethe­less mod­u­lat­ed by the series’ uchron­ic dimen­sion, since the aim is always to change the course of his­to­ry for the ben­e­fit of the McFly fam­i­ly. On the one hand, tem­po­ral alter­na­tives allow the saga to fit in with the Rea­gan­ite ide­ol­o­gy of the 1980s, which aims to revi­tal­ize the present by draw­ing on the back­ward-look­ing ideals of the 1950s. By chang­ing the course of events, Mar­ty does­n’t cre­ate a bet­ter world, but he does improve his fam­i­ly’s social sta­tus, mov­ing from the humil­i­at­ed van­quished to the vic­tors. On the oth­er hand, the filmed pasts are explic­it­ly shown as cin­e­mat­ic fan­tasies, so that each era tra­versed is already a kind of uchrony, inso­far as it is con­scious­ly the recon­struc­tion of a his­tor­i­cal past medi­at­ed by cin­e­ma. This arti­cle exam­ines the way in which the saga cre­ates a regres­sive uchrony, both ide­o­log­i­cal­ly and for­mal­ly, inspired as much by the ambi­tion to revive a van­ished time as by a nos­tal­gia for the present.
Citer
Robin Hopquin, « L’uchronie régres­sive de la trilo­gie Retour vers le futur » (n° 3 | 2024), dans Pagaille, n°3, « Rétro­topies ou l’idéal­i­sa­tion du passé », 2024, p.128–137. Url : https://revue-pagaille.fr/2024–3‑hopquin/

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