Résumé
Le cheval battu est un personnage mineur mais reparaissant de la seconde moitié du XIXe siècle. Omniprésent dans tous les domaines, cet animal faisait l’objet d’une surexploitation qui a pu donner lieu à de la maltraitance ; or, cette tendance entrait en contradiction avec l’évolution des sensibilités, de plus en plus réceptives à la compassion pour la souffrance. La violence de cette scène était donc à la fois banale à l’époque et perçue comme cruelle et intolérable. Plusieurs écrivains comme Victor Hugo, Fiodor Dostoïevski, Guy de Maupassant, Émile Zola ou encore Joseph Conrad s’en sont approprié le pouvoir d’évocation pathétique, moins pour défendre le bien-être animal en tant que tel que pour illustrer la nécessaire élévation morale de l’homme. Le cheval battu reste un personnage de l’ombre car il n’est jamais un moteur narratif, mais dans la mesure où il polarise divers enjeux moraux, sociaux et psychologiques, il est plus qu’un simple instrument. L’esthétisation de la violence permet de servir des desseins variés, de la transposition fictionnelle d’un souvenir traumatique à l’interrogation sur l’origine de la brutalité humaine, en passant par l’exploration de la frontière entre animalité et humanité.
Citer
Agnès Parmentier, « Le cheval martyr, personnage mineur de la seconde moitié du XIXe siècle », dans Pagaille, n°2, « Les personnages de l’ombre dans la littérature et les arts », 2022, p.105–117. Url : https://revue-pagaille.fr/2022–2‑parmentier/