Résumé
Dans Face à Gaïa de Bruno Latour comme dans le Prométhée enchaîné d’Eschyle, Gaïa et Gaia sont représentées comme des forces agissantes et menaçantes. Si elles ne recouvrent pas les mêmes domaines d’action, en raison des différences culturelles et fonctionnelles de leur contexte d’emploi, elles n’en sont pas moins comparables. C’est justement le rapprochement de ces deux instances qui nous permettra d’historiciser la représentation de chacune pour en comprendre à la fois la singularité et la parenté, par-delà l’effet de synonymie qu’induit l’homophonie des termes. L’enjeu de l’article est par conséquent de comparer l’élaboration de l’agentivité de la terre chez chacun de ces auteurs, en considérant dans le détail des textes quelques procédés symboliques grâce auxquels ils parviennent à animer une instance comprise dans chaque cas à partir d’un régime de rationalité différent (la science pour l’une, le polythéisme grec pour l’autre). Sans prétendre au recensement exhaustif de tels procédés, il s’agira ainsi de mettre en lumière les attributs de chacune et de rendre compte de la capacité des ressorts de l’art à figurer l’invisible, au théâtre comme en sciences.
Citer
Déborah Bucchi, « Gaï/ia sur la scène. Figurations de la terre chez Eschyle et Bruno Latour », dans Pagaille, n° 1, « Marâtre nature. Quand Gaïa contre-attaque », 2021, p. 9–16. Url : http://revue-pagaille.fr/2021–1‑bucchi/