Résumé
S’il est bien un lieu où les personnages abondent et prolifèrent, c’est l’opéra. Parmi les figures mystérieuses qui jalonnent les grandes œuvres opératiques depuis le XVIIe siècle, celle du berger surprend. À la marge de l’intrigue principale, ces figures souvent solitaires questionnent, tant sur leur présence effective que sur leurs rôles et leurs actions, parfois décisives, sur le cours de l’action. La figure du berger, si elle renvoie ontologiquement aux évocations de la nature et aux amours champêtres, se constitue bien souvent comme un double du messager ou encore comme un avatar du sage. Bien souvent réduits à de brèves interventions, bergers et bergères constituent des personnages étonnants du grand genre musical, littéraire et théâtral que constitue l’opéra. Cet article questionne leur nature, leur ambivalence, les façons dont ils influent sur l’intrigue ou encore le message symbolique dont ils se font les messagers. Présents dès les balbutiements de l’opéra dans l’Orfeo (1607) de Monteverdi, fable en musique composée à partir d’un livret d’Alessandro Striggio, bergers et bergères célèbrent tour à tour la nature et l’abondance, mêlant à leurs chants de bonnes paroles, présageant, presque toujours, le dénouement de l’intrigue qui se joue autour d’eux. Pourtant à l’opéra, même le plus petit rôle exige une attention particulière. D’une simple ligne de texte à un aria ou récitatif, en quoi la figure du berger est-elle si essentielle à l’opéra, à ce drame théâtral qui se fait jour sur scène ?
Citer
Ophélie Perrier, « Voix de bergers, voix de bergères : résonances d’une figure pastorale dans les livrets d’opéra », dans Pagaille, n° 2, « Les personnages de l’ombre dans la littérature et les arts », 2022, p. 85–93. Url : http://revue-pagaille.fr/2022–2‑perrier/