Marjorie Colin, « Des pitres entre ombre et lumière » (n° 2 | 2022)

Résumé
Eleuthe­ria de Samuel Beck­ett, La Leçon d’Eugène Ionesco et les Entrées clow­nesques de Tris­tan Rémy nous présen­tent trois fig­ures comiques qui sem­blent, en apparence, jouer un rôle sec­ondaire dans l’intrigue générale. En effet, ces trois fig­ures de l’ombre n’ont, auprès des autres per­son­nages, qu’une posi­tion sub­al­terne : un valet de cham­bre auprès d’un cou­ple fan­tasque et autori­taire, une Bonne qui est en charge de l’organisation de la leçon don­née par le Pro­fesseur et un régis­seur de piste dont la prin­ci­pale fonc­tion est d’introduire les clowns auprès du pub­lic. Tous trois sont le plus sou­vent soumis voire humil­iés par les per­son­nages qui les entourent et qui ont con­fisqué le pou­voir. Dif­fi­cile de croire que ces trois per­son­nages puis­sent avoir une autre fonc­tion que celle d’un per­son­nage de l’arrière-plan. Pour­tant, la dimen­sion farcesque de ces trois œuvres témoigne d’un ren­verse­ment presque car­nava­lesque dans la mesure où les rap­ports de force changent pro­gres­sive­ment de camp. Ain­si le valet acquiert un statut essen­tiel auprès de son maître, lui appor­tant un sou­tien presque pater­nel, la Bonne per­met au Pro­fesseur de se sor­tir d’une sit­u­a­tion plus que déli­cate et Mon­sieur Loy­al n’est plus seule­ment annon­ci­a­teur, il devient le véri­ta­ble orches­tra­teur du numéro de clowns. L’autorité se déplace alors et la lumière aus­si : par cet habile procédé d’inversion, nos per­son­nages sem­blent donc véri­ta­ble­ment sor­tir de l’ombre.
Citer
Mar­jorie Col­in, « Des pitres entre ombre et lumière », dans Pagaille, n° 2, « Les per­son­nages de l’om­bre dans la lit­téra­ture et les arts », 2022, p. 76–84. Url : http://revue-pagaille.fr/2022–2‑colin/



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