Athina Masoura « Émotions, sensorialité et art contemporain. La nourriture comme vecteur d’expérience esthétique » (n° 4 | 2025)

Résumé/Abstract

Depuis quelques décen­nies, les artistes por­tent un intérêt par­ti­c­uli­er à engager sen­sorielle­ment et émo­tion­nelle­ment le spec­ta­teur. L’essentiel n’est plus l’objet lui-même, mais la manière dont nous expéri­men­tons la propo­si­tion artis­tique. Nous obser­vons ain­si un désir de plus en plus grand de la part des artistes d’explorer des univers esthé­tiques inédits faisant appel à des modal­ités sen­sorielles longtemps nég­ligées dans la créa­tion artis­tique occi­den­tale tels que le touch­er, l’odorat et le goût.
Notre intérêt dans le présent arti­cle se portera sur des réal­i­sa­tions qui s’inscrivent dans cette lignée et dépla­cent les fron­tières entre le sujet et l’objet, l’art et la vie, situ­ant la nour­ri­t­ure et l’aspect gus­ta­tif au cen­tre de l’expérience artis­tique. Ces ren­con­tres sen­sorielles et poé­tiques, qui pren­nent en compte la cor­poréité du spec­ta­teur, s’éloignent d’une sim­ple représen­ta­tion sym­bol­ique de l’aliment et optent pour une vraie présence inscrite dans l’ici et le main­tenant. L’enjeu sera d’explorer la manière dont le spec­ta­teur conçoit l’expérience esthé­tique de la nour­ri­t­ure et quelle influ­ence l’œuvre a sur lui. De quelle façon l’expérience d’un repas peut-elle se trans­former en espace esthé­tique ? Com­ment, mal­gré sa matéri­al­ité invis­i­ble, l’odeur se trans­forme-t-elle en lieu d’habitation, en espace fic­tion­nel ? Quel lien l’aspect gus­ta­tif entre­tient-il avec notre mémoire et nos émo­tions ? Dans quelle mesure ces expéri­ences ques­tion­nent-elles notre rap­port au corps, à l’identité et au monde ?


For sev­er­al decades, artists express a par­tic­u­lar inter­est in engag­ing the view­er sen­so­ri­al­ly and emo­tion­al­ly. The essen­tial thing is no longer the object itself, but the way in which we expe­ri­ence the artis­tic propo­si­tion. We thus observe a grow­ing desire on behalf of artists to explore new aes­thet­ic uni­vers­es call­ing upon sen­so­ry modal­i­ties long neglect­ed in West­ern artis­tic cre­ation such as the sens­es of touch, smell and taste.
What we aim to by this arti­cle is to focus on pieces of art that shift the bound­aries between sub­ject and object, art and life, plac­ing food and the gus­ta­to­ry aspect at the heart of the artis­tic expe­ri­ence. These sen­so­ry and poet­ic encoun­ters, which take into account the cor­po­re­al­i­ty of the view­er, move away from a sim­ple sym­bol­ic rep­re­sen­ta­tion of food and opt for a real pres­ence inscribed in the here and now. The aim will be to explore the way the sub­ject con­ceives the aes­thet­ic expe­ri­ence of food and how he is influ­enced by this type of work. In which way the expe­ri­ence of a meal can be trans­formed into an aes­thet­ic space? How, despite its invis­i­ble mate­ri­al­i­ty, smell can become a fic­tion­al space? Which con­nex­ions the gus­ta­to­ry aspect has with our mem­o­ry and our emo­tions? To what extent these expe­ri­ences ques­tion our rela­tion­ship to the body, to iden­ti­ty and to the world in general?
Citer
Athi­na Masoura « Émo­tions, sen­so­ri­al­ité et art con­tem­po­rain. La nour­ri­t­ure comme vecteur d’expérience esthé­tique », dans Pagaille, n°4, « À la table des émo­tions: manger dans la lit­téra­ture et les arts », 2025, p. 138–146 . Url : https://revue-pagaille.fr/2025–4‑masoura/

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