Francesco Schiariti, « La difficile représentation du talent disparu: enjeux actoraux dans les biopics de Jeanne Engels et Gertrude Lawrence (1957–1968) » (n° 3 | 2024)

Résumé / Abstract
Du fait du car­ac­tère volatile de la per­for­mance théâ­trale, cer­taines inter­pré­ta­tions légendaires sur­vivent essen­tielle­ment par le sou­venir et le témoignage des cri­tiques et d’une par­tie du pub­lic. Ces per­for­mances et leur aura pour­raient être par­ti­c­ulière­ment exploitées dans le biopic de comé­di­en, sous-genre qui met la notion de per­for­mance actorale au cœur de son pro­pre dis­posi­tif en représen­tant des vedettes qui revivent ain­si à l’écran avec une époque révolue qu’ils sym­bol­isent. A tra­vers deux films hol­ly­woo­d­i­ens de l’ère des stu­dios, Jeanne Eagels (George Sid­ney, 1957) et Star ! (Robert Wise, 1968), cet arti­cle se pro­pose d’ex­am­in­er la manière dont cer­tains biopics a pri­ori idéaux pour la rétrotropie artis­tique, résis­tent en par­tie, voire totale­ment, à cette notion. La recon­struc­tion de la per­for­mance, par­fois fidèle au texte, à la mise en scène, et, quand cela est pos­si­ble, à l’ex­pres­siv­ité du mod­èle ne devient pas tou­jours un garant pour le pub­lic ou la cri­tique de réus­site artis­tique. C’est dans l’af­fron­te­ment non résolu entre les per­sonas des stars con­tem­po­raines (Kim Novak, Julie Andrews) et celles des actri­ces incar­nés dans les films (Jeanne Eagels, Gertrude Lawrence) que réside l’ex­pli­ca­tion la plus con­va­in­cante d’un échec de la représen­ta­tion rétro­topique à l’écran, sig­nalant l’im­por­tance des star stud­ies dans la com­préhen­sion de la récep­tion d’un film. Dans cer­tains con­textes, le biopic sem­ble finale­ment ne pas être tant le lieu priv­ilégié d’une évo­ca­tion du passé que celui d’une exal­ta­tion de la contemporanéité.

The Dif­fi­cult Rep­re­sen­ta­tion of Van­ished Tal­ent: Acto­r­i­al Stakes in the Biopics of Jeanne Engels and Gertrude Lawrence 
As a the­atri­cal per­for­mance is, by essense, a volatile one, some leg­endary inter­pre­ta­tions sur­vive only in some crit­ics’ and audi­ences’ minds. Those per­for­mances and the aura which is attached to them should be used in the come­di­an’s biopic, a sub­genre which puts the idea of per­for­mance into the cen­ter of its own aes­thet­ic, show­ing in action some stars who sym­bol­ise the beau­ty of their era. Exam­in­ing two Hol­ly­wood movies of the Gold­en and Sil­ver Ages, Jeanne Eagels (George Sid­ney, 1957) and Star! (Robert Wise, 1968), this arti­cle analy­ses the resis­tance and the inte­gra­tion of an artis­tic retro­topia in those pic­tures, which seems, at first, an ide­al space for it. The per­for­mance’s repro­duc­tions, even if faith­ful to the orig­i­nal in text, stag­ing and even the sub­jects’ way of act­ing is not enough to ensure the respect and love of crit­ics and audi­ences. Actu­al­ly, the unre­solved con­flict between the con­tem­po­rary movie stars’ per­sona (Kim Novak and Julie Andrews) and that of the per­son­i­fied stars’ is prob­a­bly the best expla­na­tion to the fail­ure of the retro­topic recre­ation in those two movies. That notion con­firms the impor­tance of star stud­ies in movies stud­ies, which, in those cas­es, shows the biopic is some­times more about moder­ni­ty than about nostalgia.

Citer
Francesco Schiar­i­ti, « La dif­fi­cile représen­ta­tion du tal­ent dis­paru: enjeux actoraux dans les biopics de Jeanne Engels et Gertrude Lawrence (1957–1968) », dans Pagaille, n°3, « Rétro­topies ou l’idéal­i­sa­tion du passé », 2024, p. 146–155. Url : https://revue-pagaille.fr/2024–3‑schiariti/

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